6 ème édition
Samedi 27 mars 2021
Atelier lecture avec Véronique sur la terrasse auprès de la piscine.
Plaisir d’entendre les lectures des un(e)s et des autres dans une atmosphère chaleureuse. Paroles amicales. No stress.
Soirée dansante avec le groupe de Sidate Fall ! Guitare – percussion et violon pour un concert animé !
et la dextérité du chef Cheikh pour le buffet des saveurs !
pizzas – nems – carottes râpées au cumin
salade pamplemousse – avocats – orange – crevette
aubergines grillées
brochette de lottes grillées – atiéké sauce ivoirienne
fondant au chocolat – glace vanille et chocolat
Rolland en grande explication ! son public est captivé !!
Dimanche matin : atelier d’écriture, sous le cocotier Véronique donne le sujet
Et chaque participant(e) cherche un lieu inspirant dans le Bentenier, s’installe sur une chaise africaine, dans la case aux palabres, sur un matelas, sous la véranda, qui
crédit photos : Coco et Nadine
Et vous quel endroit choisirez vous pour écrire ?
ATELIER D’ECRITURE le dimanche matin à 10 H avec Véronique
Quel serait l’ objet appartenant à ce lieu, à cet espace, qui , nous émeut particulièrement, qui fait que nous restons au Sénégal ou que nous y reviendrons ?
Savourer ce mot, le répéter, pour en extraire toute la signification , totue l’émotion qu’il contient pour nous..tel Michaux répétant le mot Baobab, rytmant son texte avec ce mot rebondissant, baobab, baobab…
Dans le soir..
TELEGRAMME DE DAKAR
Car Rapide
Laurence
La bête est lente au démarrage. Lourde, lourde du poids de ses clients.
Rapide, pas rapide le car !
Derrière, il y a lieu de se demander si elle y arrivera. On ralentit, attentif et dubitatif car il faut lui laisser place …
Enfin, l’animal décolle, jamais ne s’envole.
Pleine, sa grossesse est visible. Pourtant à chaque ralentissement, à chaque départ elle perd quelques-uns de ses enfants, ses bébés. Ça grouille à l’arrière et ça se raccroche un peu tardivement. Les coxeurs montent et descendent au gré de leurs envies, se défiant de la relative vitesse de l’engin. Coccinelle bariolée, quelle audace de couleurs, gaieté des yeux que ce bleu et jaune.
De l’intérieur de la bête c’est autre chose que de la voiture de derrière qui envisage vainement de doubler le lourd coléoptère.
ll fait chaud. Il fait noir. Plasticité des chairs, il y a toujours de la place. Les volumes des postérieurs deviennent à géométrie variable. Les odeurs se mélangent, et chaque corps, chaque hanche épouse sans complexe celle de ses voisins.
Autant la coquille, carrosserie pimpante et métallique, nous éblouit, autant son ventre sombre et sensuel, ses odeurs fortes et la générosité de ses bourrelets, nous émeut.
Sans complexe, elle dégage soudain de son arrière-train une fumée noire. Victime, l’automobiliste qui se trouve derrière encaisse.
Car rapide, carapace plutôt. Vorace l’animal.
Car rapide, tu n’es pas rapide, pis, de dépit je te pris et m’en allis.
Sophie
Grigri
Comme une cordelette enfilée de Cauris, de brindilles, de peau …de quelle bête ?
Comme un teere noué autour de la taille du nouveau-né,
Talisman lassé autour de la cheville du marchand,
Fétiche accroché aux branches et bercé par le vent,
Amulette cachée sous les matelas des dormants.
Grigri pourquoi ?
Pour enrichir les charlatans et apaiser les croyants ?
Grigri pour la protection du mal et l’attirance du bien ?
Grigri peut-être comme un aveu d’impuissance des Marabouts qui en usent et en abusent alors qu’ils sont les garants de la religion !
Grigris, restez donc mystère, restez donc chez les Djins
Le mouton au Sénégal
Orélien
Ce qui m’a tapé dans l’œil
Ma première fois à Dakar
C’est la ville comme une ferme.
Des animaux partout
Sur les terrasses, dans la rue des zébus
Dans les cours des moutons
Des poules sur la route…
Allah empêche le porc mais donne le mouton
Qui bêle, bêle, belle bête
Nourrie de restes
Nourrie de miettes
Engraissée de je ne sais quoi
Et même de cartons
Certes, on ne voit pas le Sénégal avec le mouton
Pourtant, le Sénégal sans lions vivrait ; pas le Sénégal sans moutons
Le mouton mou du menton et gras des fesses
Abondante toison
Ah ! Les gamins qui lavent leur mouton
N’importe où
Dans la mer ou
Devant leur maison
Généreux morceaux de viande
Disponible à la demande
Sacrifié de naissance
Sans un mot de complaisance
Ni de révolte, pas de résistance
Plat de résistance
Grillé ou frit
Bien vu, toujours pris
Bête religieuse et profane
Tabaski en promenade
Fête joyeuse sur pattes
Prolifique espèce
Répond « présente » à chaque rendez-vous
Pleine de noblesse et de délicatesse
Moutons doux, moutons fous,
Se laissant faire sans bouger,
Sans mettre son pied
Dans la gamelle
Moutons gentils
Bon appétit
Boutons les moutons hors d’ici
Et c’est la ruine
C’en serait fini
De ce beau pays
Mouton, foutons
Lui la paix
Et c’en est fait
Des hommes
Voilà comme
Ce pays sans l’humble ovidé
Si discret qu’on l’oublie
Serait pacotille de papier.
SÉNÉGAL
Coco
…me régale
Odeur…parfum
Odeur…agréable
Émanation…subtile
Odeur…des épices
Plats qui se préparent
Odeur…du fumet
Thiep bou jen…
Quelle aubaine
Arôme du tamarin
Eau à la bouche…
SÉNÉGAL
Au hasard…sur la route
Tes relents, me déroutent…
Me dégoûtent…
Odeur…soupçon
Pas loin…le poisson
Fumé, séché…gêne mon nez…
Odeur…voitures, relents
Gaz d’échappement, incommodants…
SÉNÉGAL
…à nouveau
Odeur…maison
Parfum intérieur…thiouraye
Discret…supportable
Envoûtant…agréable
…à nouveau
Odeur…cuisine
Prémices…des épices
SÉNÉGAL
…au jardin
Odeur…senteurs
Frangipanier…discret
Subtil…je jubile
Basilic, menthe…m’enchantent
SÉNÉGAL
Parfums…enchanteurs
J’oublie les relents qui écœurent !!!
FIN
TELEGRAMME DE DAKAR
Dominique
Élégance et majesté, entre les deux mon cœur balance.
Élégance et nonchalance, mouvements balancés, lianes.
Majesté des corps dressés, Baobab. Verticalité ?
Je ne sais pas… Joie de Vivre ?
Dakar – Sénégal
« Pays des Mille et Une Nuits » ai-je dit à la première passée ici.
Nuit au ciel immense et profusion d’étoiles. Étonnement : constellations renversées.
Je me suis souvent demandée, à chaque colère, chaque déception, pourquoi j’aimais encore ce pays…
Peut-être le souvenir de ces premiers jours, de ces premières nuits où, dans les rues, devant chaque maison, des grands-mères corpulentes s’étalaient sur leurs nattes, saluant les passants, les seins s’échappant de leurs boubous fendus, éventail à la main… Lascives femmes d’Alger, grappes d’enfants endormis à leurs côtés…
Par les fenêtres, s’insinuant dans la rue, le musc et la myrrhe embaumaient la nuit. On m’expliqua ces hande tchouraï dans les chambres, pour chasser l’humidité et attirer les hommes, les inciter à rentrer…
Au petit matin, il y eut l’appel à la prière, les mosquées qui semblaient se répondre, de loin en loin. La ville, tapie sous les bougainvillées, les nimes et les manguiers s’éveillait.
Ce fut alors l’heure des femmes. Des jeunes femmes et des jeunes filles. Au sortir du lit, mouchoirs jetés sur les têtes échevelées, elles envahissaient les rues de leur pas chaloupé, ondoyant sur le sable, leurs bassines multicolores négligemment ballottées à bout de bras, et convergeaient toutes vers les fontaines publiques. Certaines, dans leurs robes de princesses asservies aux tâches ménagères, certaines en pagnes, réajustés d’un geste large et savant. Salutations et plaisanteries fusaient. On s’esclaffait, déjà, s’interpellant de loin. Voix haut perchées.
Toutes semblaient heureuses de leur sort, sûres de leur beauté. La corvée devenait peu à peu une fête. On esquissait même, ci et là, quelques pas de danse. On se toisait, se mesurait, se bousculait gentiment, tout cela en riant beaucoup. Grâce infinie des têtes qui se renversaient sur des épaules au velours d’aubergine.
Le groupe se mouvait lentement, comme un poulpe géant autour du robinet. Aisance des gestes coulés. Au fur et à mesure, avec virtuosité, on aidait les copines à monter sur leur tête la bassine remplie, sans en perdre une goutte, puis avec la souplesse constante de leurs corps élancés, elles repartaient par deux, par trois, ondoyant sous leur fardeau pour garder l’équilibre parfait, le menton haut, aussi fières que des cariatides…
Élégance, majesté, disais-je… Joie de vivre.
Mais il n’y a pas que cet émerveillement des premières nuits et des premiers jours, si j’y réfléchis bien !
Il y a ces bonheurs quotidiens arrachés au chaos et à la misère urbaine d’aujourd’hui, mère de toutes les laideurs, les incohérences, les puanteurs, les bruits insupportables, la promiscuité déroutante parfois. Il y a Keur Bamboung et Toubacouta. Il y a Podor, et l’ilot Sarpan !
Sur ma terrasse, explose ce flamboyant auquel il ne reste pourtant qu’une branche, ramure magnifique, valant tous les couchers de soleils. Il y a cette liane envahissante de maad qui abrite notre terrasse, avec ses milliers de fleurs blanches au parfum si délicat, qui nous a créé tout l’été un écrin paradisiaque…
Et puis il y a tous ces sourires éclatants, cette générosité inattendue des gestes « du cœur », cette main d’une collègue, sur mes épaules, me caressant le dos sans rien dire lorsque j’appris par téléphone que ma sœur était entre la vie et la mort, laissant mes parents perdus à six mille kilomètres de moi… Il y a ces enfants qui m’appellent « tantie » ou « tata Dom » et me disent du haut de leurs six ans, qu’un jour ils me porteront au soleil, lorsque mes jambes n’y suffiront plus…
Oui, cela restera toujours le Pays des Mille et une nuits…
BAOBAB
Comme un balbutiement…
Monument vivant et vibrant …
Immobile en mouvement…
Témoin dans ton coin…
Isolé comme une oasis,
Nourricier comme une forêt.
Arbre ou herbe ?
Animal ou végétal ?
Eléphantesque fragilité d’un improbable château de cartes ,
Sagesse du temps à la peau ridée,
Aux membres torturés par les épreuves,
Seul avec tes cicatrices qui nous rappellent notre barbarie,
Réservoir de larmes,
Serein, plein mais en vain,
Tu es « un », « lui » ou « elle »,
Solitaire comme chacun
ANDE TJOURAI
NADINE
Sur les bords du Niger
Les potières te façonnent
Cuit au feu de bois
Tu ornes les salons des maisons
Cendres et braises chaudes
Attendent le parfum subtil
Qui à l’heure du crépuscule,
se diffusera dans la chambre
Brûle encens – brûle encens – brûle encens
Ne sens-tu pas l’odeur de ce parfum enivrant
Ande tjouraï, ande tjouraï
Tu animes les lieux
Rends les cieux
Plus audacieux
Encens pour le plaisir
Encens pour le devenir
Encens pour l’au-delà
Encens pour la purification
Ande tjourai ande tjourai
Dans ton antre,
brûlent les encens,
venus du Liban ou du Mali,
de Guinée ou de Gambie
Diguidiey et Gowey se mélangent aux muscs et aux ambres
Repoussent les esprits
Apaisent les tensions
Et parfument la maison.